dimanche 13 décembre 2009

Les amoureux du jardin public

Image forte aujourd'hui en me promenant dans le Garden of five senses. On y croise de larges et nombreuses familles venues picniquer ou se promener, quelques rares occidentaux et beaucoup de couples de jeunes indiens. Ces derniers se tiennent par la main où s'embrassent, discutent ou jouent avec leur téléphone portable. Ils sont issus de la classe moyenne, les hommes en jeans et blousons, les femmes en salwar-kamez. Ce qui choque tout d'abord, c'est de voir de jeunes couples s'exposer ainsi : impensable dans  la vie quotidienne qu'elle soit publique ou familiale. On sent en les regardant que ce lieu leur offre une minuscule parcelle d'intimité qui n'existe pas ailleurs dans leur vie. Qui sont ces filles et ces garçons ? Que deviendront-ils ? Sont-ils déjà promis à d'autres par leur famille ? J'aurais bien aimé leur poser la question ...

mercredi 9 décembre 2009

A bord d'un taxi à Delhi

Monter dans un taxi à Delhi est chose aisée : on trouve des ambassadors noires et jaunes un peu partout. Comptez quelques minutes pour négocier car il n'y a pas de compteur et le montant de la course se décide avant de grimper dans la guimbarde. Et les indiens, souvent des sikhs, fortement représentés dans cette profession, sont durs en affaire ! Enfin, le marché est conclu, 150 roupies pour un aller-retour à Vasant Vihar, Et c'est parti ...
Cà grince, çà pétarade, çà freine et bien évidement : çà klaxonne !
Si vous connaissez l'adresse où vous allez, jetez régulièrement un coup d'oeil à travers la fenêtre sale pour vérifier qu'on ne vous fait pas faire le tour de Delhi, sinon, une petite prière sikh suffira et vous pouvez somnoler tranquillement, secouer pour les accélérations brutales de Ravinder Singh ...

dimanche 6 décembre 2009

Un soir à Delhi

L'hiver, les deliites sortent : ils vont au spectacle, au concert, ils courent les vernissages. C'est aussi le temps des fêtes et des mariages qui résonnent dans les clubs de quartier et les maisons : fanfare, musique traditionnelle indienne, variété américaine sirupeuse : il y en a pour tous les goûts.
Vendredi, j'assiste à un spectacle de Soufi-Kathak créé par la danseuse Manjari Chaturvedi.
Anecdote typiquement indienne : le spectacle se déroule dans un amphithéâtre à ciel ouvert à la nuit tombée. Or, la production n'a pas réussi à faire arrêter les travaux qui jouxtaient le lieu du spectacle. Nous avons donc largement apprécié la douce mélodie de la scie sauteuse mêlée aux scansions des chanteurs soufis...
Le Kathak est une danse traditionnelle du Nord l'Inde dédiée à Krishna à l'époque médiévale, qui devient à l'époque moderne une danse de cour moghol. Ajouter une dose de poésie soufi et vous obtenez heure trente de spectacle équilibré entre musique, chants et danse mimée de Manjari Chaturvedi. La danseuse s'adresse à son amant, incarnation d'Allah ou parfois de Krishna et mime le dialogue qu'elle a avec lui.
Une belle rencontre entre soufisme et hindouisme un an après les attentats de Bombay.

jeudi 3 décembre 2009

A vélo dans Old Delhi

Drôle d'idée me direz-vous : circuler à vélo dans les ruelles étroites du vieux Delhi ou dans les avenues déversant une foule de chuk-chuks, de charrettes tirées par des ânes ou des vaches, de motos ou de bus ...
Oui, mais pas si folle quand vous traverserez New-Delhi au petit matin dans une brume épaisse et dans une ville déserte pour rejoindre la porte Turkman où vous attend votre bicyclette.
Car à sept heure, Old Delhi se réveille et les rues sont encore calmes. D'abord vous traversez le Meat Market  : au milieu de la rue coule le sang des poulets égorgés un peu plus loin. Puis, on s'enfonce dans de minuscules ruelles ou l'on croise des hindous faisant leur toilette ou leur prière devant de petits temples, des lycéennes aux nattes impeccables en train de réviser leurs leçons dans le pousse-pousse qui les conduit à l'école, des hommes derrière leur grand chaudrons préparant les dals de la journée ... Tout un monde qui vit dans la rue et derrière les portes ciselées des anciennes havelis, ces hautes maisons moghols.
Sur les eaux fétides de la Yamuna  la rivière sacrée qui traverse Delhi, où vous avez troqué votre vélo pour une barque, vous apercevez deux corps drapés dans un linge blanc sur la rive. Une crémation se prépare. A nouveau, à vélo, vous traversez le Cotton Market où s'empilent les balles de lins, de soie ou de coton. Rapide coup d'oeil à la plus grande mosquée d'Inde : Jama Masjid, puis vous rejoignez Karim, l'adresse incontournable d'Old Delhi pour un petit déjeuner à base de chapatis frais que l'on trempe dans une soupe à base de viande de chèvre : un délice !

mardi 1 décembre 2009

Rencontre

Rencontre avec Getta, une indienne qui a habité vingt ans aux Etats-Unis à Seattle avant de revenir à Delhi où elle a passé son enfance.
Elle petite, très fine et vive et parle dans un anglais international avec des pointes d'accent indien. Après vingt ans à l'étranger, elle me raconte la difficulté de son retour avec son mari et des deux garçons. En s'installant à Delhi, elle pensait retrouver son foyer  et se sentir "at home"me dit-elle. Finalement, elle retrouve une ville qui a changé et une famille et des proches qui ont leur vie. Elle regrette le Delhi "d'avant" sans ses malls à l'américaine, ses Mac Donald's et ses Pizza Hut (pourtant si peu nombreux en comparaison avec l'Europe et les Etats-Unis). Elle déplore l'occidentalisation de l'Inde et l'individualisme qui s'y développe. Getta cherche à changer de carrière : elle a travaillé pour Microsoft aux Etat-Unis et voudrait se réorienter vers l'humanitaire.
Belle rencontre d'une jeune femme à la recherche de son identité et de son destin.


vendredi 27 novembre 2009

Lodi Market : la rue de la mode de Delhi

Ballade dans Lodi Colony et son Main market.
Trois boutiques de mode indienne attirent mon attention.
La plus surprenante est sans aucun doute celle de Manish Arora, le pape de la haute couture indienne. Un univers saturé de couleurs, de formes fluides, des broderies, des motifs floraux et d'animaux et une bonne dose d'humour. C'est d'ailleurs ce qui rend la mode d'Arora vivante et accessible. Sa force : proposer un prêt-à-porter aux formes classiques robes trapèze, salwar-kameez, en jouant sur l'association de couleurs vives et des motifs élaborés. Le résultat est détonant et très réussi. On comprend pourquoi ses vêtements s'exportent en Europe et aux Etats-Unis.


Plus classique : Bian. Une marque créée par trois soeurs entre New-York et Delhi. 
Les coupe sont sobres comme les couleurs : noir, gris, beige. On y vend de magnifiques pashminas. 

Enfin Rajesh Pratap Singh. C'est une mode toujours très sophistiquée mais qui me semble moins accessible, qui se prend au sérieux.

Quoiqu'il en soit, ces trois créateurs démontrent un exceptionnel savoir-faire et un profond attachement aux coupes traditionnelles qu'ils réinterprètent avec brio. La mode indienne a de beaux jours devant elle ...







mercredi 25 novembre 2009

Abanindranâth Tagore

Rapide passage à la National Gallery of Modern Art de Delhi où sont exposées des oeuvres de l'école de Calcutta, mouvement artistique des années 20 qui prônait un retour à l'art indien issu des miniatures moghol et de la culture hindouiste.
Je redécouvre Abanindranâth Tagore, neveu de Rabindranâth, le prix Nobel de littérature. Ses paysages où viennent se glisser des personnages ou des animaux sont équilibrés et subtiles. Le portrait de sa mère oscille  entre une miniature moghol et un portrait de primitifs flamands.
Beaucoup de douceur dans ces tableaux et un art de la couleur, du cadrage et du détail très abouti.
Un peintre à suivre donc ....


Abanindranath Tagore




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lundi 23 novembre 2009

Le Gandhi Memorial Museum

Le musée est situé à l'est de Delhi dans un jardin verdoyant. Inauguré en 1961,  les collections n'ont pas bougées depuis.
Deux grandes galeries sont consacrées à la vie de Gandhi, de grandes pancartes en anglais et en hindi retracent ses grandes étapes. Sur les photos jaunies, on voit Gandhi dans les foules, en marche, dans le train, discutant avec les autorités britanniques ou ses interlocuteurs indiens : Nehru, Sard Patel.
Dans des vitrines, les dhotis du Mahatma dont celui qu'il portait lorsqu'il fut assassiné en 1948 par un extrémiste hindou, des montres ou encore son microscope.
Une belle collection de charkhas, les fameux rouets qui permettaient aux indiens de filer le coton, complète la visite. Pendant toute sa durée nous avons été accompagnés par une foule d'élèves indiens qui s'amusaient à nous prendre en photo encore et toujours ....
Nous avons malheureusement du quitter précipitamment le musée, poussés par de lourds nuages d'insecticides qui enfumaient entièrement les salles. C'est une bonne chose pour la dengue mais pourquoi choisir les heures de visite pour une telle opération ?
J'imagine que dans dix ans, ce musée sera transformé en Gandhiland, avec boutique, cafeteria et vidéos à gogo sur le Mahatma.
Une raison supplémentaire de savourer aujourd'hui ce musée si désuet.


samedi 21 novembre 2009

la fée électricité

- Allumer une lampe revient à appuyer successivement sur les 8 boutons qui composent en moyenne un interrupteur, afin de trouver enfin celui qui éclairera votre salon et ce, après avoir déclenché le fan, éteint la télévision, allumé la terrasse ...
- vous retenez votre souffle à chaque branchement d'un appareil : que va t-il se passer ? Rien ? Un éclair dans la prise ?
- les coupures de courant plongent la maison dans l'obscurité avant que le grondement du générateur vous libère d'une puissante angoisse : ouf ! C'est reparti ...
- enfin, vous terminer votre journée à quatre pattes pour brancher votre lampe de chevet qui n'a pas d'interrupteur comme toutes les lampes indiennes ...


J'aime le confort moderne à Delhi ...

Mon quartier


Ce que j'aime dans mon quartier :
- La longue complainte du chiffonnier qui passe sur son vélo dès 7 heures du matin
- Le fond de l'air un peu plus frais chaque jour depuis quelques semaines
- Les roucoulements des pigeons qui font leur nid sur notre fenêtre
- La façon dont les indiens se protègent contre le froid et l'humidité : une écharpe à carreaux nouée autour de la tête comme s'ils avaient une grosse rage de dents
- Les coups de sifflets du gardien du quartier qui fait sa ronde tous les soirs

mercredi 28 octobre 2009

Une semaine de dengue

L'épidémie de dengue est là, forte cette année semble t-il. Elle m'a valu de nombreux aller-retours dans l'un des hôpitaux les plus modernes de Delhi. D'abord, comme toujours, la foule. Des femmes en sari, en burka sombres, d'autres à la pointe de la mode, ciglées Vuitton, Ralph Lauren, le portable collé à l'oreille. Des hommes en kurta, des indiens pâles qui tripotent leur chapelet en attendant qu'on les appelle. Le personnel est efficace bien qu'un peu débordé. Première règle : payer avant de consulter. Deuxième règle : pas de civilité, il faut jouer des coudes pour éviter qu'une famille sikh passe devant vous sans rien vous demander.
Et puis soudain, alors qu'on se dit que l'attente va être longue dans l'immense salle, une infirmière vous appelle : c'est à vous. Miracle de l'Inde ....

samedi 17 octobre 2009

Happy Diwali !


Aujourd'hui c'est Diwali, la fête des lumières, le nouvel an hindou. Depuis plusieurs jours déjà, les diiliwalas, comme on appelle ici les habitants de Delhi, préparent de ce grand événement : achats de fruits secs et de friandises, de dias, ces petites lampes à huile en terre cuite qu'on installe partout chez soi pour que Lakshmi, la déesse de la prospérité, visite sa maison. Depuis hier déjà, on rend visite à la famille, aux amis et aux voisins pour se souhaiter "happy Diwali". Aujourd'hui, on prie chez soi ou sur son lieu de travail et à la nuit tombée, on allume les lampes et on lance des pétards et des feux d'artifice dans la rue.
Diwali, c'est aussi la saison des mariages : il y a deux jours, un beau marié est passé sur son cheval blanc dans notre rue ...

jeudi 15 octobre 2009

Les ballons

Scène surréaliste croisée aujourd'hui : une bataille d'enfants-vendeurs de ballons au milieu des embouteillages.


Il est 20 heures et le flot de voitures attend nerveusement la fin interminable du feu devant nous. Nous sommes quelques jours avant Diwali, la fête des lumières qui marque la fin de l'année dans le calendrier hindou de l'Inde du Nord. Tous les deliites font leurs courses en prévision de cette fête. Soudain, des petits vendeurs de ballons s'agglutinent. Des éclats de voix jaillissent des moteurs qui tournent dans la nuit. Un enfant se précipite sur un autre les bras encombrés de sa précieuse marchandise. Les bouquets de ballons commencent alors à danser au-dessus des voitures, alors que les coups partent.
Etrange instant où se superpose la violence brute de ces enfants à la poésie colorée des ballons.



vendredi 9 octobre 2009

La voix d'Indira

Avez-vous déjà entendu la voix d'Indira Gandhi ? En français ?
Elle est fluette, assez au haut cherché. Son français est excellent, l'accent est léger, les mots choisis. Parfois, la construction de ses phrases fait penser à celle d'un enfant.
Mais aussi, elle appuie sur certaines syllabes de telle façon que soudain, derrière la douceur de la voix, affleure l'immense détermination de celle qui parle.
"Non, l'Inde ne veut pas la guerre avec le Pakistan au Cachemire. Oui, la majorité des Cachemiris souhaitent que leur région reste indienne".
Indira répond poliment aux questions du journaliste, sans se laisser destabiliser un seul instant par ses remarques. Sa voix est à l'image de ses propos : maîtrisée et emprunte d'une force gigantesque que rien ne semble pouvoir arrêter.

jeudi 8 octobre 2009

L'enregistrement

Aujourd'hui, nous sommes allés nous déclarer administrativement comme résidents en Inde. Dehors, la longue queue des nouveaux arrivés grimpe les marches du bâtiment dans lequel se trouvent les services d'immigration. Afghans, Irakiens, Tibétains, Chinois, Iraniens, Africains attendent depuis plusieurs heures déjà. Des djelabas couleur sable, des drapés rouges sombres, des voiles colorés : c'est le Moyen-Orient et l'Asie qui défilent devant nous.

Un soldat sort, en grande tenue, son plumet multicolore sur la tête.

A l'étage, plusieurs guichets accueillent les candidats : les fonctionnaires indiens arrivent tranquillement et s'installent à leur bureaux où s'amoncellent des piles de formulaires et de documents maculés de poussière. Peu à peu, la salle se remplit : des hommes à la barbes noires discutent dans la file réservée aux afghans, un couple d'irakiens s'assoit près de nous.
Un petit homme se faufile entre les bureaux avec une bouilloire en fer blanc et remplit les gobelets des fonctionnaires qui tamponnent les liasses de documents, insensibles aux sollicitations des uns et des autres.
Deux heures plus tard, nous ressortons, croisant une file ininterrompue d'immigrants. Ceux-là resteront toute la journée à attendre.

lundi 5 octobre 2009

Premières fois

Voilà, çà y est, nous sommes à Delhi depuis une semaine.
Et déjà, je dresse ma liste des "premières fois" :
- première fois que je croise un mort, emmailloté dans une pièce de tissu safran, installé sur une échelle à 7 barreaux comme le veut la tradition hindou et porté à bout de bras par quatre hommes dans la rue.
- première fois que j'achète une sole dans la chaleur suffocante d'un marché. Les poissons sont installés dans des corbeilles et des bassines à même le sol. Les mouches, l'odeur pestilentielle, la foule dense, soulèvent le coeur.
- première fois que je croise une femme qui fait sont jogging en salwar-kameez (vous savez, ce pantalon avec une tunique et une écharpe portés par les femmes indiennes) dans Lodi Garden !
- première fois que je lis l'Hindustan Times en buvant du thé indien (avec du lait et beaucoup de sucre).
Rares ont été des journées qui m'ont apporté autant de nouveautés.
Bienvenue dans ce blog qui, je l'espère, vous fera mieux connaître l'Inde !